Evan&Eliott ◘ When you meet someone

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Tu es sortie. Enfin. Tu ne sais pas comment appréhender ta liberté après trois semaines enfermées. Tes cicatrices ne sont pas nombreuses mais des vestiges de ce que tu as subi et qui vont te hanter longtemps encore. Tu as peur, de tout, de rien. tu sursautes au moindre bruit, au moindre contact. Tu as peur de ton avenir, de ce que tout ça signifie. Tu souris. Tu t'arrêtes devant un jardin. C’est beau. Ca te rassure, tu es toujours autant touchée par ce qui t’entoure. Tu restes là, à contempler, puis tu avances. Tu fronces les sourcils. Ce bâtiment semble si peu.. Tu ne sais pas. Il manque d’une âme. trop simple, trop sobre, pour un refuge pour ceux qui croient en dieu. Ou c’est toi qui imagine que ça devrait être différent. Tu restes devant, à observer la bâtisse. Tu imagines ce que tu aurais ajouté. Tu imagines à quoi ressemble l’intérieur. Tu as reçu un sms de Loik. Il a peur, depuis. il vérifie qu tu es toujours là. Tu pensais ne plus pouvoir sortir dehors, avoir peur de sortir de ton cocon. mais non, tu es plus que ça. Tu ne lui donnera pas cette victoire. Tu sourira à la suite, même si tes larmes couleront encore, quand personne ne regardera. Tu souris, tu en as besoin, tout autant que les autres ont besoin de le voir. La plupart des gens rient de ça. Pensent qu’un sourire n’a aucun pouvoir. et pourtant. Un homme sort de l’établissement, tu t’en approches et lui souris. - Bonjour. Pourquoi le bâtiment est si.. Pourquoi n’est il pas..décoré ? Il me paraît triste. - Ce n’est pas un reproche, une constatation, une interrogation. C’est innocent. Tu penses quelque part que lui est peut être triste ? Tu n’aimes pas cette idée. Tu as toujours haï la laideur du mode, aujourd'hui plus que jamais.

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Aujourd'hui est une belle journée. Pas seulement parce que le soleil brille de mille feux dehors, mais parce que j'ai eu une belle surprise en passant la matinée avec l'un des membres de ma paroisse. Un homme assez intéressant, même si je trouve étrange de penser cela. Disons qu'il a une belle vie, lui aussi et qu'il m'a tout l'air du genre d'homme qui ne peut pas croire en Dieu, qui est trop terre à terre et un peu trop au-dessus de tout ça pour tomber dans ce genre de travers. Pourtant, depuis que je le connais, il vient presque tous les jours à l'église et a enfin signé son premier chèque aujourd'hui. Une belle somme, avec assez de zéros après le cinq pour me faire sourire de toutes mes dents. Il trouve l'église trop austère, trop impersonnelle. Et ce petit don qu'il m'a généreusement fait tout à l'heure, il compte bien que je m'en serve pour investir dans un peu plus de fioritures pour habiller la maison de Dieu.

Cette idée me fait sourire autant qu'elle m'exaspère. C'est une belle somme, c'est vrai et l'argent m'a toujours... excité, je crois. Mais si je ne fais pas les travaux qu'il attend, il risque de se rendre compte de la supercherie et ça, ce serait vraiment mauvais pour les affaires. L'assurance de me faire une très mauvaise réputation alors que je viens seulement d'entrer en jeu. Ça ne peut pas arriver, pas aussi tôt. Je n'aime pas tellement Seattle, mais le pasteur Sharman me plaît bien. Enfin, l'admiration qu'il suscite me plaît.

Cela dit, ce n'est pas parce que je vais être obligé de réellement me servir d'une bonne partie de cet argent pour la raison pour laquelle on me l'a donné, ça ne signifie pas pour autant que je ne peux pas en profiter quand même un peu. Et ce midi, monsieur le pasteur va se payer un repas de rêve ! Du moins, c'est exactement mon intention quand je mets le pied dehors. Mais j'ai à peine le temps de verrouiller la porte derrière moi qu'une jeune femme me saute dessus pour me poser une question pour le moins... étrange. Je fronce un sourcil en l'écoutant, alors que le coin de mes lèvres se soulève pour afficher un sourire sincèrement amusé. C'est la journée ou quoi ? Combien de gens encore vont-ils se pointer pour critiquer la décoration de ma chapelle ?

Je détourne le regard de la jeune femme un instant pour le poser sur le bâtiment derrière moi. C'est vrai que ça ne casse pas trois pattes à un canard, mais je la trouve très bien, moi ! Simple, sobre mais belle... Il n'y a pas tant à redire. Je regarde de nouveau l'inconnue, lui souriant toujours. « Je ne suis qu'un humble pasteur. » lui dis-je de mon plus bel accent. « Servir Dieu est une bénédiction, mais ça ne paye pas très bien, voyez-vous. Alors, je fais de mon mieux avec ce que j'ai. » C'est exactement le genre de réplique qui a fonctionné avec mon généreux donateur de ce matin et je suis tellement de bonne humeur que j'ai envie de tenter ma chance à nouveau. C'est ce qui me pousse à observer la jeune femme plus en détail, pour jauger un peu ce que je peux espérer obtenir d'elle. Elle est jolie, mais elle a l'air aussi un peu mal en point. Et pas vraiment de rouler sur l'or. « Est-ce que vous allez bien, mademoiselle ? » je demande gentiment. « Voulez-vous entrer une minute pour discuter ? J'allais aller déjeuner, mais si vous avez besoin d'aide, je suis là pour ça, après tout. »

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Il semble étrange. Tu trouves pas aussi crédible ce qu'il dit pourtant avec assurance. Il n’a pas l'air humble. Par contre il est beau. Tu as remarqué ses traits. Tu ne saurais dire ce qui t'attire ou te gêne. Tu as toujours été qu’emotions et sensations. Et cet homme ne te renvoie pas vraiment l'idée qu'il semble vouloir montrer. Mais après tout, qui le fait ? Tu es entourée de gens étranges. De gens qui ne te montre pas ce qu'ils sont. Certains parce qu'il ont peur de ton regard. Tu étais assurée , avant, de ton innocence. Mais tu ne l'es plus toi aussi, tu caches des choses. Tu voulais sa mort. Tu voulais fuir. Tu as haï ce qu'il a pu te faire penser. Tu repenses à ce qu'il a fait, ce que tu as vu. Tu as envie de vomir. Tu souris quand il te propose de t'aider. Peut être que tu te trompes. Peut être qu’après Nolan, tu ne sais plus lire les gens. Peut être que tu vois le mal partout. Tu as envie de te convaincre qu'il reste des gens bien. - J’ai faim. Mais je ne veux pas m'imposer. Vous devez avoir tellement à faire. Tellement de gens à aider. Je suis désolée, je… Je ferais mieux d’y aller. Je suis désolée de vous avoir dérangé. - Tu as honte. Tu n’as plus ce qui faisait de toi ce que les gens recherchent. Tu n'es qu'une coquille vide. Une part de toi serait bien restée dans cette cave. La ou personne ne voyait ce que tu étais devenue. Tu te dégoûtais. Tu avais peur. Peur de ne plus aimer le reflet du miroir. Celui de ton âme. Tu es toujours là. Tu n’as pas bougé. Tu aimerais qu'il devine. Qu'il sache. Qu'on te dise que non tu n'es pas devenue laide à l’intérieur. Que tout n’est pas encore perdue. Tu aimerais te retrouver. Te rassurer. Pas te noyer.

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Cette fille me semble un peu étrange, je ne sais pas trop pourquoi, mais elle a l'air préoccupée. Je ne perds pas mon sourire, mais j'ai bien compris que je n'obtiendrais rien d'elle, pas maintenant en tout cas. Je dois lui servir un peu plus de mon charabia si je veux tenter ma chance. Cette arnaque est la plus difficile que j'ai monté. Séduire des anglaises pour qu'elles me fassent confiance, c'était facile dans le fond, je pouvais me montrer entreprenant et direct. Obtenir la confiance d'une poignée d’immigrés mexicain aussi, ils auraient suivi n'importe qui capable de leur faire passer la frontière et j'ai un capital sympathie élevé. Mais jouer les pasteurs... c'est compliqué. Les gens doutent plus facilement de l'existence de Dieu quand ils sont confrontés au quotidien. C'est un travail qui demande du temps et une interprétation sans failles....

Mon sourire se fait doux et compatissant quand la jeune femme me dit qu'elle a faim, mais qu'elle ne veut pas s'imposer. Il est évident qu'après mon petit laïus sur le fait de n'être qu'un humble pasteur, je ne peux plus l'inviter à aller déjeuner dans le restaurant étoilé que je visais pour ce midi. Mais cette jeune femme ne m'a pas l'air trop dangereuse et je me dis que c'est peut-être une bonne manière de me pratiquer, de répéter mon rôle, vous voyez ? « Je vous en prie, laissez-moi vous inviter à déjeuner. Il y a un restaurant chinois à quelques portes de là qui livre. J'ai leur brochure dans mon bureau. » dis-je de ma voix la plus douce et agréable qui soit. Je ne la lâche pas des yeux pendant une petite seconde, puis je m'éloigne pour retourner près de la porte de mon église contre laquelle je m'appuie, mais sans l'ouvrir de suite. « Il y a rarement du monde pendant la pause déjeuner, vous me feriez vraiment plaisir si vous acceptiez de me tenir compagnie. » ajouté-je. Et j'attends, tranquillement, qu'elle se décide à venir ou pas.

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